Prendre en compte le « social » dans la restauration des écosystèmes – l’engagement communautaire, un gage de réussite
"Il faut tout un village pour élever un enfant" - il pourrait en être de même pour la restauration des écosystèmes. Les connaissances et les pratiques autochtones des populations locales jouent un rôle essentiel dans la préservation et la protection de leurs forêts et de leurs paysages. Elles devraient être prises en compte dans toutes les tentatives et activités visant à restaurer l'écosystème afin d'atteindre des objectifs durables à long terme.
La Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes 2021-2030 a pour objectif de prévenir, stopper et inverser le processus de dégradation des écosystèmes dans le monde. La COP15, qui aura lieu en décembre, va également introduire un cadre global afin de mettre en place des mesures qui mettront un terme à la perte de biodiversité dans des sites majeurs.
Pour obtenir des résultats à long terme, les initiatives devraient renforcer l’autonomie des communautés locales en leur fournissant un accès égal à la connaissance, aux ressources et aux opportunités. Tout en plaidant pour que la restauration soit menée de manière impartiale et équitable, ces initiatives devront également prendre en compte l’injustice sociale afin de garantir leur représentation et de prendre en compte leurs besoins. De cette façon, la restauration des paysages est aussi en mesure de répondre aux besoins de la population locale.
Le Norme de restauration des écosystèmes version de Preferred by Nature va également dans ce sens et place les petites propriétaires et les projets communautaires (PP&C) au cœur de ses principes directeurs. Le standard répond non seulement à des préoccupations environnementales mais aborde aussi l’aspect social, qui est un des facteurs clés de la réussite de tout programme de restauration.
La connaissance et l’expertise des autochtones font partie du processus
Le norme a été conçu de manière à pourvoir aux besoins en fonction du contexte local et à aider les PP&C à rendre leurs efforts visibles. Il est de ce fait en phase avec les mouvements internationaux liés à la restauration des écosystèmes et les ressources associées. Il fait en sorte que les communautés locales prennent connaissance et comprennent le processus documentaire requis, mais minimal, et encourage l’utilisation des technologies de l’information et de la communication. Le groupe est alors en capacité de se conformer à toutes les conditions et exigences du standard.
« Ce standard unique en son genre est très « social » “par nature et a été conçu pour répondre correctement aux préoccupations des PP&C. Et il intègre des éléments importants comme le consentement libre, informé et préalable (CLIP), l’implication des parties prenantes, les prestations sociales et l’impact social, ainsi que les conditions de travail et les droits des travailleurs », explique Mateo Cariño Fraisse, directeur du programme Utilisation des terres chez Preferred by Nature.
De nombreuses recherches et des faits concrets mettent en évidence que les peuples indigènes et les communautés locales sont les meilleurs gardiens pour nos forêts.
« Il est fondamental de conserver et d’appliquer les connaissances, pratiques et techniques des peuples indigènes pour sauvegarder et restaurer notre environnement et nos paysages. Donner la priorité aux petits propriétaires et communautés locales permet au standard de combiner les activités de restauration aux connaissances et expériences du territoire afin d’obtenir des résultats à long terme plus satisfaisants », explique Mateo.
Deux projets de restauration communautaires en Afrique et en Amérique du Sud ont appliqué récemment ce nouveau standard. Le Cottars Wildlife Conservation Trust (CWCT) au Kenya est le premier projet à avoir été validé à l’aide du Standard de restauration des écosystèmes. Le projet des communautés Rio Blanco et Nokoborema, soutenues par APCOB (Apoyo para el Campesino del Oriente de Bolivia), est devenu le premier à faire l’objet d’une vérification selon le standard en Bolivie.
Préserver la biodiversité en protégeant en parallèle la culture indigène – CWCT au Kenya/strong
Maasai Mara est l’une des aires de conservation de la faune sauvage les plus connues et les plus importantes d’Afrique. La communauté Masaï est connue dans le monde entier pour sa culture spécifique, ses rituels, ses danses et vêtements traditionnels ainsi que ses courageux guerriers. Elle est établie dans de vastes régions du nord, du centre et du sud du Kenya, ainsi que de l’autre côté de la frontière dans le nord de la Tanzanie.
Le CWCT est situé dans cette zone et associé à l’Olderkesi Community Wildlife Trust (OCWT), constituée de 6 650 membres (propriétaires) au Kenya. Cette collaboration aide le projet pilote de l’Olderkesi Wildlife Conservancy (OWC) à couvrir 3 080 hectares à la frontière de la réserve nationale Maasai Mara et du parc national Serengeti.
En préservant des couloirs de déplacement de la faune sauvage, OWC a pour ambition de devenir une communauté pionnière en matière de conservation dans l’écosystème du Grand Maasai Mara et de montrer qu’il est possible de protéger efficacement les espèces animales et végétales. Ainsi, relier de vastes zones protégées de la réserve de Maasai Mara au Kenya et du parc Serengeti en Tanzanie a pour objectif de créer un espace sûr pour la faune.
La protection de l’écosystème pour CWCT et OWCT passe par la combinaison de différents usages des sols à des activités de développement économique et social, notamment la conservation de la faune, le tourisme, le pastoralisme, la préservation de la culture et d’autres activités commerciales respectueuses de l’environnement et de la communauté.
Les deux partenaires ont mis en place un système de gouvernance participative solide destiné à superviser toutes les questions de gouvernance, notamment les pratiques en matière de responsabilité et de transparence. Ils espèrent créer ensemble d’autres liens et collaborer avec d’autres groupes de conservation de l’écosystème du Grand Maasai Mara pour assurer la pérennité environnementale de la région.
« La conservation est au cœur du projet Cottar’s Safaris et la biodiversité notre mission première », affirme Louise Cottar, copropriétaire deCottar’s Safaris.
« Collaborer avec nos partenaires communautaires était crucial pour initier le dialogue et développer des stratégies sur la manière d’aborder cette question complexe », explique-t-elle.
« L’équipe a considéré que le standard de restauration des écosystèmes offrait un cadre crédible pour évaluer et mesurer de manière objective la pertinence de notre réflexion par rapport aux meilleurs pratiques actuellement en place à travers le monde. Cela nous a aussi permis d’aiguiser notre sens critique afin de nous assurer que notre stratégie tenait compte de l’inclusivité et de la participation, et avait une portée holistique », ajoute Louise Cottar.
En avril 2022, Preferred by Nature a mené un audit de validation de la réserve. L’évaluation a confirmé qu’une attention spéciale avait été apportée à la planification et la mise en place du projet.
L’organisation étant communautaire, « nous avons adopté une approche plus flexible pour évaluer les résultats, ainsi que l’autorise le Standard de restauration des écosystèmes, ce qui permet de les évaluer dans une perspective d’amélioration continue », explique Mateo.
À cœur vaillant rien d’impossible – APCOB en Bolivie
Située dans le territoire indigène de Chiquitano Monte Verde (TI MV), les communautés de Río Blanco et Nokoborema font partie du Central Indígena de Comunidades de Concepción (CICC). Avec l’organisation non-gouvernementale Apoyo para el Campesino-indígena del Oriente Boliviano et le soutien financier de Forests of the World, les deux communautés collaborent afin de parer aux menaces qui pèsent sur les forêts tropicales sèches (SDTF) et de restaurer les écosystèmes forestiers dans leurs régions.
En Amérique du Sud, les biomes de SDTF comme ceux de Chaco et Cerrado, sont caractérisés par des climats humides, secs et chauds et des zones de faible altitude plus exposées à la sécheresse et à la fréquence des feux de forêts. Par ailleurs, ces forêts abritent une grande diversité faunistique et floristique distincte. Les plantes et les animaux de ces zones sont issus de différentes sous-régions d’importance majeure chacune abritant des espèces qui lui sont spécifiques. Cependant, sauver ces ressources et cette biodiversité exceptionnelles exige davantage d’initiatives de conservation.
Les deux communautés ont décidé de passer de la théorie à la pratique. L’initiative projette de reconquérir les espaces forestiers dégradés par les feux de forêt et de favoriser la régénération d’espèces forestières destinées au commerce du bois. Elles ont aussi mis en place des systèmes agroforestiers et sylvopastoraux pour améliorer la productivité et assurer la pérennité des sols, tout en protégeant les zones les plus vulnérables et préserver les ressources en eau.
Au-delà de la restauration des écosystèmes, l’initiative vise à favoriser la gestion durable des ressources du territoire, protéger les moyens de subsistance et assurer la sécurité alimentaire à long terme. Les communautés veulent aussi se donner les moyens de se doter d’équipements plus adaptés pour lutter contre les effets néfastes du changement climatique et les fréquents feux de forêts, et pour protéger certaines zones d’activités extérieures telles que l’agriculture et l’élevage intensifs.
Les deux communautés ont finalisé leur plan de restauration, avec le soutien d’APCOB, Forests of the World, ainsi que GIZ et WWF Bolivia, qui fournissent une assistance technique aux communautés du TI MV. Bien que les thématiques puissent paraître divergentes, l’objectif principal est de renforcer les capacités des communautés à gérer leur territoire et leurs ressources de manière durable tout en diversifiant les activités économiques productives afin d’améliorer leurs conditions de vie.
« La restauration des forêts est une action qui fait partie de l’objectif global de Bosques del Mundo (BdM) permettant de préserver les forêts et la biodiversité afin d’agir sur le climat mondial », déclare Javier Bejerano, conseiller et spécialiste en foresterie chez Forests of the World.
« Le processus de restauration des écosystèmes a été proposé dans le cadre d’un projet sponsorisé par Erik Kauffeldts Fond pour servir de garantie et assurer la qualité documentaire des résultats obtenus avec les communautés, en s’appuyant sur le travail d’évaluation et de vérification d’un standard indépendant. Ce processus d’évaluation a aidé les conseillers et les partenaires de Forests of the World à optimiser la mise en œuvre du projet », explique Javier Bejerano.
En outre, « la certification des zones restaurées permettra aux communautés et aux organisations partenaires de promouvoir le projet et de chercher des sponsors afin de le répliquer dans d’autres communautés et l’étendre à d’autres territoires de la région », ajoute Javier Bejerano. Javier.
L’évaluation par Preferred by Nature selon son Standard de restauration des écosystèmes vérifie les activités déployées dans le cadre du projet pour réduire les dommages causés par les feux de forêt et soutient les communautés pour qu’elles renforcent et gèrent leur propre système de lutte contre les effets néfastes du climat.
Suivre les principes directeurs du Standard de restauration des écosystèmes, permet aux petits propriétaires et aux communautés d’avoir accès aux informations et connaissances nécessaires pour que les activités de restauration produisent les résultats escomptés.
« Le standard fixe des critères destinés à encourager ces groupes à participer aux processus de prise de décision. Cela permet de garantir que leurs besoins et préoccupations sur des questions environnementales et sociales soient pris en compte et que les activités permettant d’y répondre soient intégrées au plan d’action », explique Mateo.
En respectant les procédures de suivi et d’évaluation continus, de tels projets de restauration mettent toutes les chances de leur côté pour garantir une gouvernance transparente, l’égalité des droits et un système impartial de gestion des conflits. Intégrer le « social » au processus contribue aussi à améliorer et pérenniser la sécurité alimentaire pour les habitants de la communauté actuels et les générations futures grâce aux initiatives de restauration.
>> Pour en savoir plus sur le Standard de restauration des écosystèmes, cliquer ici.