Critère de conversion : le temps du changement
Ayant participé aux événements liés à l’assemblée générale du FSC depuis plus de trente ans, Richard Donovan a pris le temps de donner son point de vue sur la motion 37, proposée cette année à l’AG qui se tient à Bali en Indonésie.
TCette année, l’AG s’attelle une fois de plus à un des sujets les plus sensibles du système FSC : la conversion de forêt en plantations ou autres usages des sols. La motion 37 porte sur la politique du FSC de réparation des conversions et le cadre de remédiation..
Le FSC a choisi 1994 comme date butoir pour exclure de la certification FSC la conversion des forêts naturelles en plantations. Ce critère de conversion a jusqu’ici empêché le FSC d’influencer la gestion des forêts dans de nombreuses régions tropicales où des conversions ont eu lieu, notamment depuis 1994.
Le FSC a modifié le critère de manière à ce que les conversions de forêts intervenues entre 1994 et 2022 soient éligibles à la certification, si les entreprises réparent les dommages provoqués. Le programme est aujourd’hui à deux pas d’un changement fonctionnel majeur pour le système FSC avec la mise en place d’une nouvelle politique de réparation des conversions, la motion 37, tout en étant plus proactive sur les réparations environnementales et sociales.
« Je crois qu’il est temps d’avancer comme le propose la motion 37. Aucune motion n’est parfaite, mais celle-ci exige de traiter directement avec les parties prenantes et les détenteurs de droits affectés afin de résoudre les problèmes de réparation engendrés par la conversion. En outre, elle met le FSC dans une position globalement beaucoup plus réaliste partout dans le monde, pas uniquement en Indonésie ou en Afrique mais partout », a déclaré Richard Donovan.
La motion 37 requiert une réparation spécifique, basée sur les informations détaillées et objectives de toutes les chambres et sous-chambres du FSC, ainsi que du conseil d’administration. Elle impose des dépenses lourdes aux entreprises qui ont converti des forêts et permet au FSC de s’impliquer dans des pays où les gouvernements encourageaient la conversion depuis la fin de l’année 1994 à décembre 2020.
« Notre système ne peut pas se permettre de continuer à patauger autour de cette question. Nous avons besoin de dépasser les discussions et la théorie et de progresser sur le terrain en matière de réparation sociale et environnementale. Nous devons dans le même temps continuer de prêter attention aux inquiétudes des membres du FSC et tirer parti de leurs observations pour améliorer la future mise en œuvre de la motion 37 », a ajouté Richard Donovan.
Certaines parties prenantes ont critiqué l’ensemble du processus de « conversion et réparation », inquiètes d’une adoption précipitée de la motion et affichant parfois leur manque de confiance envers le personnel, le bureau ou le système FSC, parmi d’autres.
De nombreuses entreprises sont désormais prêtes à entrer dans le système FSC et à mobiliser des fonds et des efforts pour corriger les erreurs passées en matière de conversion des forêts. Cependant, l’accès leur est pour le moment coupé.
Si l’on prend comme exemple concret le caoutchouc, 50 % des conversions en plantations de caoutchouc sont intervenues après 1994. Par conséquent, le FSC ne peut pas constituer une solution évolutive pour le secteur des pneumatiques à moins que le système n’ouvre un accès vers la réparation comme le propose la motion 37.
Au sein de la relativement nouvelle GPSNR (Global Platform for Sustainable Natural Rubber), dont l’adhésion représente 60 % du marché mondial du caoutchouc, les fabricants automobiles et de pneus et les industriels du caoutchouc évaluent les ressources naturelles durables possibles et un modèle d’assurance pour des plaintes crédibles. Mais si la certification FSC ne donne pas accès à plus de la moitié de l’approvisionnement en caoutchouc, ils chercheront et développeront des solutions alternatives.
« Ce secteur n’attendra pas la prochaine AG, car les fabricants de pneus doivent adapter d’urgence leurs sources d’approvisionnement pour se conformer aux nouvelles règles de l’UE applicables aux produits « zéro déforestation », qui incluent à l’heure actuelle le caoutchouc a expliqué Richard Donovan.
La certification FSC constituant le programme forestier le plus rigoureux au monde, elle est en mesure d’améliorer les moyens de subsistance de millions de petits propriétaires fermiers qui produisent du caoutchouc et de protéger les droits des différentes parties prenantes, tout en freinant de nouvelles déforestations et en favorisant la restauration de conversions passées.
Il nous restera des choses à apprendre pendant la mise en œuvre de la politique de réparation des conversions, du cadre de remédiation et de la nouvelle politique d’association (PfA), déjà approuvées par le conseil d’administration. Mais nous devons apprendre par la pratique et pas par la théorie, et la motion 37 nous y prépare », a-t-il poursuivi.
« La population et les écosystèmes qui attendent depuis longtemps des réparations et des restitutions dépendent de la démarche du FSC. Les remèdes ne seront efficaces qu’en proposant des récompenses – accéder à l’adhésion au FSC et à une certification potentielle – qui se doivent d’être rigoureuses mais qui sont nécessaires. Nous avons besoin de changement tout de suite ».